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Yamina Zoghlami interrogée dans l’affaire de la session parlementaire virtuelle, libérée sous caution

Le mardi 28 janvier 2025, le doyen des juges d’instruction du Tribunal de Première Instance de Tunis a entendu Yamina Zoghlami, ancienne députée de l’Assemblée des Représentants du Peuple (bloc parlementaire du parti Ennahdha). Elle a été maintenue en liberté sous caution et soumise à des tests d’identification.

L’affaire concerne la session plénière en ligne tenue par l’ancienne Assemblée des Représentants en mars 2022, qui avait suscité une large controverse. Le Parquet du Tribunal de Première Instance de Tunis avait ordonné l’ouverture d’une enquête contre les participants à cette session virtuelle, accusés de plusieurs chefs d’inculpation, notamment :

•⁠ ⁠Formation et participation à un groupe illégal.
•⁠ ⁠Attaque visant à modifier la structure de l’État.
•⁠ ⁠Incitation au chaos et atteinte aux biens et aux personnes.

Le nombre d’accusés dans cette affaire s’élève à 100 anciens députés du précédent parlement (dissous), issus de divers blocs parlementaires. Ces derniers avaient tenu une session plénière virtuelle en défi des mesures exceptionnelles prises par le président Kaïs Saïed depuis le 25 juillet 2021, incluant la suspension du travail parlementaire. Lors de cette session, 116 députés (sur un total de 217) avaient voté en faveur d’un projet de loi annulant ces mesures exceptionnelles, sans aucun vote contre ni abstention. Plusieurs députés avaient appelé, lors de leurs interventions, à un dialogue national ainsi qu’à l’organisation d’élections législatives et présidentielles comme issue à la crise politique, économique et sociale. À la suite de cette session, le parlement avait été définitivement dissous.

Contexte politique

Cette session virtuelle s’inscrit dans les tensions politiques que la Tunisie a connu après les décisions du président Kaïs Saïed de geler les travaux du parlement en juillet 2021 et de s’octroyer tous les pouvoirs. L’affaire a suscité des critiques en matière de droits de l’homme, s’inscrivant dans une série de poursuites visant les leaders de l’opposition.

Commentaire de l’Observatoire pour la Liberté en Tunisie

L’Observatoire pour la Liberté en Tunisie appelle au respect des droits de la défense et à la transparence des procédures judiciaires dans cette affaire. Il souligne également la nécessité pour les autorités de se conformer aux normes internationales garantissant un procès équitable, en évitant toute instrumentalisation politique de la justice et toute politique de représailles contre des positions politiques.

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La Tunisie n’est plus l’exception arabe qui a inspiré le monde en 2011 avec une révolution héroïque qui a renversé le pouvoir de Zine El Abidine Ben Ali, qui a régné pendant près de 23 ans après avoir pris le pouvoir le 7 novembre 1987, lors d’un coup d’État contre Habib Bourguiba.

Dans une démarche similaire et peut-être plus dangereuse, dans la nuit du 25 juillet 2021, le président tunisien Kais Saied a réalisé un “coup d’État constitutionnel” conformément à son interprétation personnelle de l’article 80 de la Constitution révolutionnaire de 2014, annonçant qu’il avait pris une série de mesures exceptionnelles en raison du “danger imminent” qui menace la Tunisie, sans fournir de détails ni de raisons.

Conformément à ces mesures, Saied a limogé le gouvernement et le premier ministre Hichem Mechichi qui était présent au Conseil de sécurité nationale ce soir-là au palais de Carthage, et a affirmé avoir contacté le président du Parlement Rached Ghannouchi (chef du parti Ennahdha) pour le consulter conformément à ce qui est stipulé par la constitution, une affirmation que Ghannouchi a démenti puisque l’appel était général et ne comprenait rien au sujet des mesures exceptionnelles ou d’une quelconque consultation sur la question. Le président a suspendu le Parlement, puis l’a dissous en mars 2022, et ce, simplement quelques jours après avoir admis publiquement qu’il n’avait pas les capacités légales de ce faire, en réponse à une session plénière en ligne du Parlement lors de laquelle les députés ont abrogé les décrets publiés par Monsieur Saied depuis son coup d’État.

Non seulement Saied a cherché à contourner ses pouvoirs et les articles de la Constitution, qu’il a juré de protéger devant l’Assemblée des Représentants du Peuple, mais il a également démis de ses fonctions et modifié la composition du Conseil Supérieur de la Magistrature après avoir redéfini le pouvoir judiciaire comme une “fonction” plutôt que comme une autorité indépendante. Il a également remplacé les membres de l’Instance Supérieure pour l’Indépendance des Élections en vue du référendum qu’il a organisé pour voter sur une constitution qu’il a rédigée lui-même après avoir rejeté les propositions du comité de rédaction qu’il avait lui-même nommé. Des élections législatives ont ensuite été organisées en deux tours, pour lesquelles le taux de participation n’a pas dépassé 8 % du nombre total d’électeurs, la Commission électorale annonçant par la suite qu’il avait atteint 11 %, soit le taux de participation le plus faible en Tunisie et dans le monde.

Le 11 février, le régime du président Saied a lancé une campagne de protestation qui n’a pas cessé depuis, contre des dirigeants politiques, des personnalités des médias, des journalistes, des juges et des hauts fonctionnaires, pour des accusations de “complot contre la sécurité de l’État et d’acte offensant contre le président de la République”, en plus d’autres accusations qui ont été transmises au parquet militaire, ce qui amène à s’interroger sur l’implication de l’armée tunisienne dans les actions entreprises par Saied.

Les arrestations arbitraires ont été entachées de plusieurs vices de procédure, ce qui a suscité des critiques de la part d’organisations internationales et d’observatoires de premier plan dans le domaine des droits de l’homme. Les normes relatives à la durée et aux conditions de litige et de détention n’ont pas été respectées. Les poursuites et le harcèlement se sont parfois étendus aux familles des détenus, et aucune preuve, et dans de nombreux cas, aucune accusation, n’a été présentée contre eux.

En outre, les syndicats et les partis politiques continuent d’être soumis à un harcèlement et à des restrictions, constants. Monsieur Saied continue de cibler tous les “corps intermédiaires” en les accusant de “collaboration” ou de “trahison”. Les associations de la société civile ont également fait l’objet de poursuites, d’arrestations arbitraires et de privation de représentation, dans un contexte de violence croissante au sein de la société due à l’adoption par les autorités de discours et de rhétorique racistes et discriminatoires incitant aux luttes intestines et portant atteinte à la dignité humaine.

Compte tenu de ce qui précède, nous, soussignés, demandons ce qui suit :

  1. La libération immédiate et inconditionnelle de tous les détenus politiques. Nous demandons également aux autorités tunisiennes de reconnaître les traités nationaux et internationaux relatifs aux droits de l’homme qu’elles ont ratifiés.
  2. Nous demandons aux autorités tunisiennes de cesser de démanteler la démocratie naissante et de mettre fin aux procès et aux poursuites inéquitables contre les opposants politiques au régime et contre toute personne qui le critique.
  3. Nous appelons tous les militants et observateurs à rejoindre le mouvement national pour le rétablissement de la démocratie et la fin du régime autoritaire qui a ramené la Tunisie au despotisme, à l’injustice et aux violations des droits et des libertés.