Le Tribunal de Première Instance de Gabès a prononcé, à la fin du mois de décembre, une peine de trois mois et demi de prison avec sursis contre Ahmed Laamari, leader du Parti Ennahdha et ancien député. Ce jugement intervient dans une affaire dont les détails n’ont pas été clairement communiqués par le tribunal ou la défense. Cette décision a suscité une vive controverse, en raison des convocations et arrestations répétées de Laamari ces dernières années, dans des contextes politiques sensibles, et en raison de son état de santé fragile.
Détails de l’affaire et arrestations précédentes
Ahmed Laamari a été soumis à une série d’arrestations et de poursuites judiciaires. En janvier 2024, il a été arrêté après une descente de police à son domicile à Ben Guerdene, menée par une équipe de sécurité spécialisée. Lors de cette opération, des boîtes d’archives liées à ses activités parlementaires ont été saisies.
Le 8 août 2023, la chambre d’accusation spécialisée dans les affaires de terrorisme a décidé de renvoyer Ahmed Laamari et l’ancien ministre Mehdi Ben Gharbia devant la chambre criminelle spécialisée dans les affaires de terrorisme, pour des accusations liées à des « crimes de nature terroriste ».
Le 8 mars 2023, le juge d’instruction du Tribunal de Première Instance de Gabès avait émis trois mandats de dépôt contre Ahmed Laamari, l’ancien ministre de l’Agriculture Mohamed Ben Salem, et un colonel des douanes. Ces mandats étaient liés à des accusations de « participation à un groupe visant à préparer et planifier un départ illégal du territoire tunisien ». Ahmed Laamari a été libéré temporairement en septembre 2023, après plusieurs mois de détention.
En décembre 2024, le Tribunal de Première Instance de Gabès a condamné Ahmed Laamari à trois mois et demi de prison avec sursis pour des soupçons de fausses déclarations lors de sa candidature aux élections présidentielles.
Libération temporaire et ré-arrestation
La famille d’Ahmed Laamari a confirmé que les autorités l’ont libéré temporairement dans la nuit du 24 décembre 2024, sur décision de la chambre criminelle du Tribunal de Première Instance de Tunis. Les procédures de libération ont été achevées le 25 décembre à 2 h du matin, après son transfert de la prison de Mornaguia à la zone de la Garde nationale. Sa famille l’a récupéré dans un état de santé critique.
Son avocat, Mokhtar Jemai, a indiqué que Laamari est rentré à son domicile à Chahbania, mais a été convoqué de nouveau le jeudi 26 décembre au siège de la Garde de Ben Guerdene. Après des heures d’interrogatoire, il a été relâché.
Cependant, le même soir, alors qu’il se préparait à subir une opération chirurgicale délicate à l’hôpital Charles Nicole, sur recommandation de son médecin traitant, il a été convoqué de nouveau par la Garde de Ben Guerdene pour des investigations supplémentaires. Il n’a pas été libéré depuis.
État de santé et abus continus
Son avocat a confirmé qu’Ahmed Laamari souffre d’une grave détérioration de son état de santé en raison des mauvaises conditions de détention et de l’absence de soins médicaux adéquats. Les convocations répétées à des moments inappropriés et l’empêchement de subir une intervention chirurgicale urgente constituent une forme d’abus systématique, soulevant de sérieuses inquiétudes quant à sa sécurité physique et psychologique.
Commentaire de l’Observatoire Freedom for Tunisia
L’Observatoire Freedom for Tunisia exprime sa profonde inquiétude face au harcèlement continu dont est victime Ahmed Laamari, en particulier compte tenu de la détérioration de son état de santé et du refus des soins médicaux nécessaires. La manipulation des procédures de libération et les ré-arrestations successives, malgré des recommandations médicales urgentes, constituent une violation flagrante des droits humains et des normes internationales d’un procès équitable.
Appel de l’Observatoire
- L’Observatoire appelle à la libération immédiate d’Ahmed Laamari pour lui permettre de recevoir les soins de santé nécessaires.
- Il exhorte les autorités tunisiennes à mettre fin aux abus systématiques contre les détenus politiques et à garantir un traitement digne et humain.
- L’Observatoire insiste sur l’importance de respecter les normes de procès équitable et de rejeter toute instrumentalisation de la justice à des fins politiques.
La poursuite de ce schéma de harcèlement et d’arrestations, dans un contexte de dégradation des droits humains en Tunisie, menace de saper la confiance dans le système judiciaire et risque d’aggraver les tensions sociales et politiques.