La Chambre Criminelle spécialisée dans les affaires de terrorisme auprès du Tribunal de Première Instance de Tunis a décidé, ce mardi, de reporter le procès de l’affaire dite du “complot contre la sûreté de l’État” au 11 avril 2025, tout en rejetant toutes les demandes de mise en liberté provisoire déposées par la défense des accusés.
Une mesure exceptionnelle : un procès à distance sans la présence des accusés
Dans une décision sans précédent, l’administration judiciaire a opté pour un procès à distance, interdisant aux accusés d’être physiquement présents dans la salle d’audience. Cette mesure exceptionnelle contrevient aux règles fondamentales du procès équitable.
Dans plusieurs législations comparées, les procès à distance ne sont autorisés que pour des délits mineurs, car la présence physique de l’accusé en salle d’audience constitue une garantie essentielle dans les affaires criminelles, notamment en cas d’accusations graves pouvant entraîner de lourdes peines.
Dans de nombreux pays, les tribunaux limitent strictement le recours aux procès à distance, ne l’adoptant qu’en cas de nécessité absolue et sous des conditions strictes pour préserver les droits de la défense et les garanties d’un procès équitable.
Une affaire politique par excellence : 50 accusés, dont des politiciens, avocats et hommes d’affaires
L’affaire remonte à février 2023, lorsque les autorités ont lancé une vaste campagne d’arrestations visant d’importantes figures politiques, d’anciens responsables, des avocats et des hommes d’affaires. Le nombre total d’accusés dépasse 50 personnes, poursuivies pour constitution d’un groupe visant à comploter contre la sécurité intérieure et extérieure de l’État.
D’après l’équipe de défense des accusés, cette affaire est de nature politique, et vise des figures opposées au gouvernement sous des accusations vagues, sans preuves juridiques claires.
L’Observatoire pour la liberté en Tunisie : Détention arbitraire prolongée et violation des garanties d’un procès équitable
L’Observatoire pour la liberté en Tunisie exprime sa profonde inquiétude face à la détention prolongée d’un grand nombre d’accusés sans procès équitable depuis plus d’un an, ainsi que le rejet systématique des demandes de mise en liberté provisoire sans justification légale suffisante.
L’Observatoire souligne également que le recours à un procès à distance dans une affaire de cette envergure constitue une violation flagrante des droits des accusés, les privant de leur présence physique devant la cour, ce qui affecte leur capacité à interagir directement avec le tribunal et leur équipe de défense.
L’Observatoire appelle à :
- Garantir un procès équitable à tous les accusés, conformément aux normes internationales des droits humains.
- Permettre aux médias d’assurer une couverture libre et transparente de l’affaire.
- Mettre fin à l’usage des procès à distance dans les affaires criminelles graves, en raison de leur atteinte aux droits de la défense.
- Libérer immédiatement les personnes détenues arbitrairement, en l’absence de preuves claires contre elles.
- Cesser d’instrumentaliser la justice pour réprimer les opposants politiques et garantir son indépendance totale.