Tunis, le 17 juin 2025 – La Chambre criminelle près la Cour d’appel de Tunis a décidé mardi de reporter l’audience dans l’affaire de l’ancien secrétaire général du Syndicat des fonctionnaires et agents de l’appareil judiciaire, Hattab Ben Othman, et d’un certain nombre de syndicalistes. Cette décision a été prise après que la chambre concernée a choisi de renvoyer l’affaire au Premier président de la Cour d’Appel pour désigner une autre chambre. Cette décision s’explique par le fait qu’un membre de la formation actuelle avait déjà traité le dossier lorsqu’il était devant la Chambre d’Accusation.
Hattab Ben Othman a comparu à l’audience en détention provisoire, aux côtés de plusieurs membres du syndicat poursuivis dans le même dossier, pour faire appel des peines de prison initiales, allant de 3 à 5 ans. Ben Othman avait été condamné à 14 ans et 3 mois de prison. Ces jugements ont suscité une vague d’indignation dans les milieux syndicaux et de défense des droits humains, en raison de leur sévérité et des conditions du procès.
Contexte de l’affaire :
L’affaire remonte à la période où Hattab Ben Othman présidait le Syndicat des fonctionnaires et agents de l’appareil judiciaire. Lui et plusieurs de ses collègues ont été poursuivis pour mauvaise gestion, abus de pouvoir et atteinte à l’administration, dans le cadre d’activités syndicales qui étaient alors perçues comme dirigées contre les autorités exécutive et judiciaire. Des observateurs estiment que le moment choisi pour relancer l’affaire et la sévérité des condamnations reflètent une volonté de réprimer l’action syndicale dans le secteur de la justice et d’intimider les voix dissidentes au sein des institutions officielles.
Début 2024, la procédure a été accélérée de manière injustifiée et l’affaire a été directement renvoyée devant la chambre criminelle, sans respecter le principe de gradation des recours. Cela a conduit l’équipe de défense à contester l’ensemble du processus judiciaire, et à demander précédemment le dessaisissement de la chambre en charge, une demande qui a été examinée lors de l’audience de ce jour.
L’Observatoire pour la Liberté en Tunisie considère que cette affaire s’inscrit dans une série de procès politisés visant des leaders syndicaux ou des figures de l’opposition, dans un contexte général marqué par l’isolement politique et les restrictions aux libertés syndicales. L’Observatoire exprime également sa préoccupation face au deux poids deux mesures dans les poursuites engagées contre certains responsables mais pas d’autres, en l’absence de garanties de procès équitable et d’impartialité judiciaire.
L’Observatoire pour la Liberté en Tunisie appelle à :
- Respecter le principe d’impartialité dans la désignation des juges et éviter de confier les affaires à des magistrats ayant déjà eu à les examiner ;
- Révéler les véritables raisons ayant conduit à l’accélération des poursuites contre les syndicalistes pendant qu’ils exerçaient leurs fonctions représentatives ;
- Garantir le respect du droit à la défense et à un procès équitable pour les accusés dans cette affaire ;
- Lever toutes les restrictions imposées à l’activité syndicale indépendante, notamment au sein des institutions judiciaires.