15 juillet 2025 – Plusieurs experts du Conseil des Droits de l’Homme des Nations Unies ont exprimé leur vive inquiétude face à la dégradation de la situation des avocats en Tunisie au cours de l’année écoulée, soulignant une « tendance préoccupante au ciblage des avocats pour leurs opinions ou pour avoir défendu leurs clients », ce qui constitue une violation grave des principes du procès équitable et de l’indépendance de la justice.
Dans une déclaration conjointe, la Rapporteuse Spéciale de l’ONU sur l’indépendance des juges et des avocats, Margaret Satterthwaite, et la Rapporteuse Spéciale sur la liberté d’opinion et d’expression, Irene Khan, ont affirmé que l’arrestation de l’avocat et ancien magistrat Ahmed Souab en avril 2025, à la suite de ses prises de position publiques concernant les procès des opposants au régime, est un exemple dangereux de l’utilisation de la justice pour faire taire les voix critiques.
La déclaration mentionne également l’affaire de l’avocate Sonia Dahmani, arrêtée et poursuivie en raison de ses déclarations médiatiques. Elle a été condamnée à 18 mois de prison en janvier 2025, puis à deux années supplémentaires en juin 2025, en vertu du Décret 54.
Les experts onusiens ont également cité plusieurs autres avocats visés par des poursuites pénales, notamment Dalila Msaddek, Islem Hamza, Ayachi Hammami, Ghazi Chaouachi, Mehdi Zagrouba et Lazhar Akremi, des cas qualifiés de « poursuites à titre de représailles », simplement pour avoir exprimé leurs opinions ou participé à la défense de militants et d’opposants.
Contexte
Depuis le 25 juillet 2021, la Tunisie connaît une augmentation marquée du nombre de poursuites visant des avocats, des magistrats, des journalistes et des opposants politiques, dans le cadre d’une campagne répressive marquée par l’expansion des pouvoirs exécutifs et l’utilisation du Décret 54 pour poursuivre les dissidents sur la base d’accusations vagues liées à la sécurité ou à des atteintes l’honneur des institutions.
L’Observatoire pour la Liberté en Tunisie a déjà documenté plusieurs violations à l’encontre des avocats, notamment des poursuites injustifiées, des perquisitions dans les locaux des instances professionnelles, ainsi que l’émission de jugements par contumace sans respect des garanties fondamentales d’un procès équitable.
L’Observatoire pour la Liberté en Tunisie appelle à :
- La fin immédiate des poursuites judiciaires de représailles à l’encontre des avocats et des opposants politiques ;
- La libération sans condition de tous les avocats détenus arbitrairement ;
- Le respect des obligations internationales de la Tunisie en matière de liberté d’expression et de droit à la défense, y compris les Principes des Nations Unies relatifs au rôle du barreau ;
- Un positionnement clair des ordres d’avocats et des instances judiciaires face aux tentatives de musellement de la profession d’avocat ;
- La poursuite du suivi par le Conseil des Droits de l’Homme de l’ONU et ses Rapporteurs Spéciaux de la situation en Tunisie, ainsi que la documentation continue des violations commises.