9 juillet 2025 – La Chambre Criminelle du Tribunal de Première Instance de Tunis a condamné, jeudi, le journaliste Mohamed Boughalleb à deux ans de prison ferme. Ce jugement a été prononcé en vertu du Décret n° 54, à la suite d’une plainte déposée par une enseignante universitaire, pour « outrage à un fonctionnaire public via le réseau de télécommunications ».
Mohamed Boughalleb a comparu devant le tribunal en liberté provisoire. Sa défense avait demandé un report de l’audience afin de convoquer le plaignant. Toutefois, le tribunal a choisi de rendre son jugement par contumace, selon Me Hamadi Zaafrani, membre de son équipe de défense.
Contexte de l’affaire :
Mohamed Boughalleb avait déjà passé 11 mois en prison, entre mars 2024 et février 2025, à la suite de deux condamnations dans des affaires distinctes :
- La première concernait des accusations de diffamation envers un fonctionnaire public. La peine initiale avait été réduite de 12 mois à 8 mois de prison.
- La seconde portait sur des publications jugées offensantes à l’encontre d’une enseignante universitaire, pour lesquelles il avait également été condamné à une peine d’emprisonnement.
Libéré sous caution en février 2025, Boughalleb restait exposé à de nouvelles poursuites en raison de ses prises de position passées. Malgré son retrait volontaire du commentaire politique depuis sa libération, les autorités judiciaires ont poursuivi leur acharnement à son encontre, dans le cadre d’une politique systématique d’intimidation des journalistes visant à encourager l’autocensure.
Violations documentées à son encontre :
Pendant sa détention, Mohamed Boughalleb a été soumis à de mauvais traitements et à une dégradation manifeste de son état de santé. Aucune enquête n’a été ouverte sur les abus qu’il a subi, illustrant l’impunité persistante pour les violations commises à l’encontre des journalistes emprisonnés et autres prisonniers d’opinion.
Mohamed Boughalleb souffre de plusieurs maladies chroniques, notamment le diabète, l’hypertension artérielle et des problèmes cardiaques, nécessitant un traitement médical constant. Son état s’est fortement détérioré en prison : il a perdu totalement la vue de l’œil droit, souffre d’une perte auditive sévère à l’oreille gauche, de fortes douleurs prostatiques l’empêchant de s’asseoir, ainsi que d’œdèmes cutanés.
L’Observatoire pour la liberté en Tunisie exige :
- La libération immédiate et inconditionnelle de Mohamed Boughalleb, ainsi que la fin des poursuites arbitraires à son encontre ;
- L’ouverture d’une enquête indépendante sur ses conditions de détention passées et les violations dont il a été victime ;
- Une révision complète du Décret n° 54, afin de garantir le respect de la liberté d’expression et de proscrire la poursuite des journalistes pour leurs opinions ;
- La fin de l’instrumentalisation du pouvoir judiciaire à des fins d’intimidation politique et médiatique en Tunisie.